Une inconnue arrive au Cat's Eyes ? [Libre]

- Il me semble que c’est par là…

Je lève les yeux de la carte que j’ai acheté il y a quelques heures pour balayer la zone du regard. Mes yeux se posent sur plusieurs enseignes, toutes écrites en japonais forcement. Et je ne vais pas pouvoir demander à quelqu’un de m’aider à les comprendre. Non pas qu’il n’y ait personne dans les rues, loin de là. C’est même bondé… Bon après on est en début d’après-midi, un samedi qui plus est, donc ça parait normal qu’il y ait du monde de sortis. En tout cas, j’ai bien peur qu’aucun de ses badauds ne puissent m’aider à cause de la barrière de la langue. J’aurai du mieux me préparer à ma venue ici… J’ai déjà eu un aperçu de la « maîtrise des langues étrangères » et de l’accueil réservé aux gens qui viennent de l’extérieur lorsque je suis arrivé à l’entrée de la ville.

J’ai eu du mal à me faire comprendre en anglais avec mon accent, et c’était presque pire avec mon japonais approximatif. Ils ont réussi à m’orienter vers « l’office de tourisme » de la ville, où j’ai réussi à me faire comprendre un peu mieux et où j’ai pu obtenir une carte de la ville. Et maintenant, ça fait deux bonnes heures que je crapahute dans la ville. Alors évidemment, je me suis vite rendu compte que la carte n’était pas forcement adapter pour moi… TOUTE EN JAPONAIS… évidemment… Et c’est plus par dépit qu’autre chose que j’ai dû faire appel au « Cornet à dés », au « Guide », pour m’indiquer la bonne direction. J’ai donc appelé Perthro mentalement, puis l’ai laissé diffuser doucement son énergie en moi pendant que je lui superposé l’image du Cat’s Eyes. Plus efficace qu’un GPS, il m’a guidé instinctivement vers ma destination pendant une bonne heure et demie. D’ailleurs, il continue de me dire qu’il faut que j’aille plus loin dans cette rue.

Je réajuste mon sac à dos et m’engage à nouveau dans la rue. Je passe devant plusieurs immeubles presque identiques, qui sont surement des barres d’appartements. Ce qui me fait dire cela, c’est la présence de gens dans les escaliers, montant ou descendant, en famille. Un sourire triste étire mes lèvres l’espace de quelques secondes lorsque mes yeux se posent sur une petite fille juchée sur les épaules de son père, éclatant de rire alors qu’il se fait houspiller par sa moitié. Je force mon regard à s’accrocher à autre chose, chassant les pensées tristes et obscures qui commence à faire surface. Et c’est à ce moment que ma boussole magique me fait comprendre que je suis arrivé à destination. En effet, mes yeux viennent d’accrocher l’enseigne bleu-ciel portant l’inscription tant recherchée : « Cat’s Eyes ».

- Enfin arrivée !.... Bon maintenant, va falloir résoudre le problème de communication…

Il semble y avoir encore un peu de monde en terrasse alors que je m’approche de la porte. Je sors le médaillon en forme de croissant de lune d’une poche accessible de mon sac et le passe autour du cou. Ce petit bijou va me servir de traducteur le temps de ma présence en ces lieux. Inoffensif et pas très élégant en apparence, il possède une gravure sur la partie du médaillon qui reste normalement invisible habituellement. Cette gravure représente un Galdr me permettant de traduire instantanément ce que je t’entends en suédois et de traduire ce que je dis en langue locale. Une fois devant la porte, je me stoppe l’espace de quelques secondes, calmant ma respiration un peu saccadé suite à ma marche intensive. Puis, sans plus d’hésitation, j’ouvre et franchis le seuil du café…

A peine le seuil franchit, une agréable odeur vient me titiller les narines. Je ferme les yeux et hume le délicieux parfum. J’arrive à distinguer une odeur de caramel, d’agrumes, surement des oranges, et surement un produit de la mer. C’est un poisson que je ne connais pas apparemment… Enfin ce n’est pas important. A cela viennent se mélanger l’odeur de café et de thé. Je prends une profonde inspiration et souris bêtement en sentant une légère effluve de cuir apparaître derrière les autres. Durant le même temps, mes esgourdes se retrouvent assaillies de cris incompréhensibles, de tintements de vaisselles, de conversations inaudibles… En bref, un brouhaha agresse mon audition. Je reste moins d’une dizaine de secondes dans cette position, le temps de laisser mes sens s’habituer aux stimuli. Malheureusement pour moi, c’est le moment que choisit Magpie, la pie qui ne me quitte que très rarement, pour venir se poser sur le haut de mon sac à dos, en battant furieusement des ailes. Étrangement, tout ce ramdam a stoppé brusquement toutes les conversations. Le visage légèrement crispé, je me risque à ouvrir un œil, et comme je m’y attendais, tous les regards étaient tournés vers moi. Le visage toujours crispé, j'essaye d'étirer mes lèvres en un sourire désolé.

- Euh.... Bonjour ? articulai-je lentement en sentant le médaillon diffuser une légère chaleur à travers ma peau. Est-ce que vous servez des « Irish Coffee » sans café ?

J’essaye de retrouver un semblant de contenance en souriant bêtement pendant que les quelques clients présents se gaussent plus ou moins discrètement. A première vue, le médaillon fonctionne. La situation s’est quelque peu détendue et alors que je relâche ma respiration, mon regard se pose sur la jeune femme installée derrière le comptoir. Elle m’observe avec des yeux ronds, son geste figé dans le nettoyage d’un verre, la bouche légèrement ouverte. Ses yeux semblent alterner entre mon visage et la pie posée sur mon sac. Puis elle finit par émettre un son…

- Magda ?..... Maggie, c’est toi ?

- Aï !!

La jeune femme fait le tour du comptoir et se précipite vers moi pour se jeter à mon cou. Notre étreinte durent quelques secondes, faisant remonter de vieux souvenirs… de beaucoup trop vieux souvenirs. Quelques larmes humidifient mes yeux alors que ma cousine ébouriffe mes cheveux et caresse les plumes de Magpie. S’ensuit une pluie de questions discontinue parmi lesquelles se trouvent la raison de ma présence ici, ce que j’ai fait durant les dix dernières années, si je compte rester longtemps, et si j’ai un endroit où loger. J’élude la majorité des questions et choisis de répondre que je compte rester un certain temps et que ces sœurs m’ont dit qu’elle pourrait surement m’héberger le temps que je reste dans la Cité Scolaire. Et c’est avec un immense sourire et une joie non dissimulée qu’elle m’annonce qu’il y a une chambre de libre au-dessus du café, si ça m’intéresse. Pour ce qui est du loyer, un coup de main au café quand je ne suis pas occupé par « mes affaires ». « Et tu tombes quand même vachement bien, cousine ! J’allais justement commencer à chercher quelqu’un en plus ! » ajoute-t-elle en posant sa main sur mon épaule. Puis elle passe dans mon dos et commence à me pousser vers la porte qui se situe au fond de la salle avec un panneau « Private Staff Only ». Elle me fait signe de monter pour poser mon sac et de redescendre pour discuter.

Je grimpe donc les marches dissimulées par cette porte et finit par arriver dans une vaste pièce aménagée en salon avec tout le confort. La pièce donne l’impression d’être vaste à cause de la cuisine ouverte sur le salon, avec pour seule séparation entre les deux « pièces » un comptoir. Trois portes donnent sur la pièce. L’une permet d’accéder aux commodités, les deux autres donnent sur les chambres. La première chambre, assez spacieuse et au vu du bazar à l’intérieur, est surement celle de ma cousine. La salle de bain semble être accessible par sa chambre. L’autre chambre, à l’opposé de l’appartement, est presque aussi spacieuse que l’autre, mais l’ordre y régnant m’indique qu’il n’y doit pas y avoir beaucoup de passage. Je pose donc mon sac à dos contre le lit, ouvre la fenêtre donnant sur la rue, y jette un œil, puis revient vers mon sac, retire mon casque audio et le pose sur le lit, touche la croix de l’Eglise Evangéliste Luthérienne fixée à mon sac, et redescend dans la salle du café. Une fois de retour en bas, ma cousine me fait signe de venir m’assoir au comptoir avant de relancer la discussion.

- Alors cousine, qu’est-ce que tu racontes de beau ?

Sachant pertinemment ce à quoi elle pense en posant cette question, j’essaye de lui résumer succinctement les dix années écoulés depuis notre dernière rencontre : la difficulté à surmonter la mort de mes parents, le réconfort trouvé auprès du Père Björn et de l’Eglise Evangélique Luthérienne, une scolarité un peu difficile et un diplôme d’histoire obtenu récemment, avant de terminer sur ma décision de voyager en tant que « Experte de reliques anciennes ».

- « Experte » carrément ? Ce n’est pas un peu trop pompeux pour une gamine de vingt ans ? me dit-elle avec un sourire en coin.

- J’admets que « Consultante » serait plus proche de la réalité, mais ça n’est guère plus pompeux que « Gérante d’un café/restaurant dans un gros district de la Cité Académique » du haut de tes vingt-cinq ans. répliquai-je en souriant de tout autant.

Messages : 97 Date d'inscription : 01/07/2017

Ah le retour au cat’s… Ça faisait un bon moment que j’avais quitté le travail à cause de mes… soucis persos. La gérante s’était montrée très compréhensive malgré le fait que je n’avais pas vraiment donné de bonne excuse, juste une vague explication comme quoi j’avais besoin de temps ou un truc du genre… En tous cas elle ne m’avait pas posé trop questions quand j’étais revenue la semaine d’avant, elle s’était juste enquéri de mon état de santé, me demandant comment ça allait et si j’avais pu régler mes soucis.

Ça faisait bizarre de revenir là. La vie insouciante et tranquille de serveuse de café n’était pas pour me déplaire mais j’avais du mal encore à ne pas être sur mes gardes tout le temps. Si j’avais eu le choix je serais probablement restée chez moi ad vitam aeternam mais il fallait que je fasse mine de rien le temps que tout se tasse.

Il n’y avait pas trop de monde ce jour-là, c’était plutôt tranquille au début mais vers le milieu du service le second en cuisine avait dû s’absenter pour régler une affaire de famille ce qui avait plongé tout le café en situation de flux tendu permanent, poussant tout le monde à devoir travailler à son maximum pour ne pas faire trop patienter les clients. Les serveurs devaient apporter les commandes au plus vite pour laisser le plus de temps possible au cuisinier pour préparer tout avant que l’attente soit trop longue et chacun devait donc faire son travail sans anicroche au risque de détruire toute l’organisation qui avait été mise en place.

C’est dans ce contexte qu’une personne étrange arriva. Une rousse à la dégaine assez inhabituelle qui passa le pas de la porte avant de se planter là pour regarder ce qui se passait à l’intérieur. Jusque là rien de trop inhabituel mais un oiseau vint se poser sur son sac à dos en faisant un boucan terrible au point que la curiosité des gens prirent le pas sur leur humeur joviale -et légèrement bourrée pour certains- et, dans un silence tout à coup pesant, ils tournèrent tous leur regard sur la fille que je regardais déjà juste avant.

- Euh.... Bonjour ? Est-ce que vous servez des « Irish Coffee » sans café ?

Souriant légèrement devant une telle réaction, je repris rapidement mon travail sans porter plus d’attention à la nouvelle venue, histoire de ne pas me faire engueuler. Faisant des allers-retours je constatai finalement que Aï, la patronne, avait visiblement des accointances avec la jeune fille à l’oiseau. Et pas des moindres vue qu’elle se jeta à son cou pour l’enlacer, visiblement très heureuse de la voir.

N’écoutant pas plus avant la discussion, je constatai simplement qu’Aï emmena la rouquine à l’étage avant qu’elles ne redescendent toutes les deux pour se mettre au comptoir et papoter. Cela dit c’est à ce moment que le gars en cuisine me demanda d’aller chercher la patronne pour un coup de main, ce que je fis même si je n’étais pas spécialement heureuse d’interrompre la discussion qu’elles avaient l’air toutes deux très heureuses d’entretenir.

-« Euh chef, y a Torako qui demande de l’aide. Je crois qu’il y a un soucis avec une machine ou un truc du genre... »

La regardant partir à la hâte, je me tournai finalement vers la jeune femme inconnue avant de lui faire un léger sourire.

-« Chouette le piaf ! Il est toujours avec toi ? » demandai-je, cachant assez mal mon vif intérêt pour la question. « Moi c’est Lena. Lena Anderson. »

Ma cousine regarde fixement quelques secondes la jeune fille aux cheveux lâches, puis une expression de terreur, comme si elle venait de voir un fantôme, s'empare de son visage avant qu'elle parte en trombe vers la cuisine. L'employée de ma cousine me sourit légèrement et se présente après avoir fait une remarque sur Magpïe. A première vue, elle semble avoir le même âge que moi et est un peu plus grande. Ses yeux sont magnifiques.

- Magda Ikklepotts, Magda est mon prénom. me présentai-je à mon tour en lui tendant la main avant de la retirer aussitôt. Ah pardon... L'habitude des poignées de mains en guise de salutations. Je n'ai pas encore la maîtrise de vos rituels.

Je lui souris franchement, alors que la pie perchée sur mon sac pousse un petit piaillement. J'approche ma main vers elle, la laisse se perchée dessus et lui caresse doucement le dos. Puis toujours avec le même sourire, je décide de répondre à la question de Lena.

- En effet ce « piaf » est toujours avec moi, dis-je en insistant bien sur « piaf ». Elle s'appelle Magpïe. Elle me considère comme un membre de sa famille je pense, et il en est de même pour moi... On ne dirait pas comme ça, mais cette pie a plus de dix ans...

J'approche ma main de mon épaule gauche pour permettre à l'oiseau de changer de perchoir, puis une fois les deux mains libres, je commence à fouiller dans les grandes poches situées sur les jambes de mon pantalon en m'excusant auprès de mon interlocutrice. J'en extirpe un petit rouleau de tissu, ainsi qu'une petite boite en fer. Je déroule le tissu sur le comptoir et pose la boite dessus, ouverte, révélant que son contenu n'est autre que de la nourriture pour oiseau. Je donne un petit coup de tête dans le flan de la pie qui commençait à s'impatienter, lui donnant ainsi le signal qu'elle attendait. Elle saute donc de mon épaule et donne un coup d'aile avant de se réceptionner sur le tapis. Elle se positionne devant la boite, tourne sa tête vers moi, et à peine ai-je le temps de lui dire « Régales-toi », qu'elle se met à donner des coups de becs dans son « assiette ».

- Avant que tu ne poses la question, oui je transporte toujours ça sur moi. On ne sait jamais ce qu'il peut arriver à un sac de voyage, dis-je en me retournant vers Lena. Je me suis déjà fait avoir une fois, alors maintenant, je prends les devants.

Apparemment, mon petit manège a attiré l'attention de plusieurs clients. Je me tourne vers eux et m'excuse pour tout ça. Puis ensuite, je promène un regard circulaire sur la salle, toujours aussi pleine.

- Y'a toujours autant de monde? Je comprends mieux pourquoi ma cousine n'est pas très disponible...

» Carte du Cat's Eyes
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