Hikaru vs Eitaro : The Valse of the Dragon and the Tiger

-Fujiwara-san, vous êtes prête ?

Le cœur d'Hikaru plongea dans sa poitrine.

-En.-Encore une minute s'il vous plait.


Elle aurait aimer que sa voix tremble moins. Un grognement d'approbation se fit entendre derrière la porte et l'arbitre s'éloigna. Hikaru se concentra sur son reflet dans le miroir. Ce qu'elle voyait ne la rassurait pas. Son visage était pale. Elle pouvait voir dans ses propres yeux le reflet d'une chose qu'elle n'aurait jamais penser ressentir : la peur de se battre.

Une peur complétement irrationnelle ! Elle était parfaitement guéris du combat d'avant. Son nez ne lui faisait plus mal, ses oreilles fonctionnaient, quoiqu'elles bourdonnaient parfois, et elle se sentait fraiche comme au saut du lit. Normalement, elle devrait se sentir prête a vaincre n'importe qui. Et pourtant, ses jambes tremblaient. Dès qu'elle pensait a son adversaire, ses pensées fuyaient vers quelque chose de plus rassurant. Elle n'avait qu'une envie : ouvrir la porte et courir, courir loin d'ici, ou se rouler en boule et attendre que ça passe, qu'on l'oublie et qu'on la laisse tranquille. Elle ne voulait plus combattre. Alexandra Kotadjima lui avait voler ça.

"Pourquoi est ce que je suis encore la ?" Une question qui résonnait encore et toujours dans sa tête. Elle avait perdu le dernier combat. C'était évident. Toutes les personnes en train de regarder l'affrontement ne pouvaient qu'arriver a cette conclusion. Tout ce que Kotadjima avait a faire, c'était de l'achever. Et pourtant elle l'avait laissée continuer. Laisser avancer. Peut être qu'elle avait peur du prochain adversaire ? Peut être qu'il était trop fort pour elle, et elle préférait envoyer quelqu'un d'autre au casse pipe. C'était de la lâcheté. Kotadjima était une lâche. Seule une lâche abandonne un combat.

Pourtant, elle était lâche en ce moment même. Elle se regarda a nouveau. Depuis quand est ce qu’elle se laissait abattre comme ça ? Elle était pourtant la dernière a porter l'insigne d'Airin dans ce combat. Elle ne pouvait pas fuir. Elle devait venger Coco. Au moins pour elle, elle devait monter sur le ring et faire face. Elle pris son bokken, et sortit du vestiaire.

La première fois, elle avait ignorer la foule. Ce coup çi, le poids des regards était plus lourd sur ses épaules que toutes les armures du monde. Elle fit de son mieux pour garder une démarche digne et fière. Sa fierté : la seule chose qui l'empêchait de fuir et qui lui permettait d'apparaitre prête au combat. Elle salua en entrant sur le ring et se dirigea vers le centre. Son regard se posa sur son adversaire. Eitaro Kimura. A ce qu'elle avait compris, il contrôlait le magnétisme et le métal. Hikaru avait donc pris soin de ne rien porter de métallique sur elle, même si cela semblait inutile étant donné la quincaillerie que le garçon avait ramené.

Elle s'inclina respectueusement et se présenta :

-Fujiwara Hikaru. Heureuse de te rencontrer. Faisons unbf... un bon combat.

Pourquoi est ce qu'elle se mettait a bégayer comme ça ?? Pourquoi maintenant ? Ses sourcils se froncèrent, énervée envers elle même alors qu'elle levait son bokken pour se préparer au combat. Mais même cela ne voulait pas venir : sa garde semblait étrange, sa prise mauvaise, elle corrigea trois fois le placement de ses pieds. La panique remonta brusquement.

Comment est ce qu'elle pouvait espérer le vaincre si elle n'était même pas maitre d'elle même ?

Même expression, même tenue, même matériel. Eitarō sorti dans la salle d’affrontement de la même façon qu’il l’avait fait pour son premier affrontement. Les seules différences qui auraient pu être notées par les yeux les plus vifs étant la remise à neuf du cylindre légèrement enfoncé par Noah Amber et la rectification des rares plus apparus sur le costume de l’universitaire.

De nouveau, l’audience était particulièrement bruyante, peut-être même plus encore que la fois précédente. Très vite l’étudiant de Dangai se fit la réflexion que plus vite ce combat se terminerait, plus vite il aurait droit à un peu de calme.

Ceci étant dit, il ne fallait pas se précipiter. Aussi, après s’être arrêté au milieu se sa moitié du ring et avoir posé son matériel sur le sol –la bobine à sa droite et les un cylindre de chaque côté cette fois-ci - Eitarō offrit toute son attention à son adversaire. Il avait vu son combat bien sûr et, alors qu’il s’était attendu à une victoire de la fille aux cheveux de feu, devait admettre qu’il avait été surpris par l’abandon de cette dernière. Non, dans les faits elle avait gagné.

Hikaru Fujiwara, 16 ans, level 2 et de ce qu’il avait pu voir, kendoka. Les informations qu’Eitarō avait recueillies de l’affrontement vinrent rapidement compléter le profil qu’il dressait mentalement.

Malgré son niveau 2, le pouvoir de la jeune fille avait un effet immédiat et non suppressible. Déjà-vu, inversion des forces appliquées à un objet sur un cours lapse de temps. Dans les faits il s’agissait plus d’un rembobinage qu’autre chose. Contrairement à la réduction de la friction de l’air appliquée par Noah, cette capacité là était bien plus dangereuse. Cependant, pour une application instantanée au niveau 2, le contrecoup devait se faire sentir, raison pour laquelle Hikaru ne l’avait pas utilisé à tors et à travers comme Noah. Autrement dit, si l’utilisation du pouvoir était déjà limitée lors de l’affrontement précédent, elle l’était encore plus actuellement. Quand au caractère inévitable de Déjà vu une fois activé, Eitarō était prêt à en tester les limites si l’occasion se présentait.

La jeune fille aux cheveux blancs prit la parole la première.

-Fujiwara Hikaru. Heureuse de te rencontrer. Faisons unbf... un bon combat.

Il n’y avait pas besoin d’être un expert pour s’en rendre compte ; l’adolescente avait une attitude bien différente de celle qu’elle arborait fièrement lors de sa première apparition. Était-elle intimidée par un senpai plus âgé à la capacité puissante ? Non, elle venait de lui confirmer sa précédente défaite.

Pourtant, l’universitaire ne laissa rien paraître, se contentant de s’incliner à son tour les bras le long du corps.

« Kimura Eitarō, enchanté de même. »

Et le signal du début retentit. Sans que l’esper aux cheveux violets ait bougé d’un millimètre, le câble se déroula furieusement de la bobine, tel un serpent s’échappant de sa cage à toute vitesse. Avec la même efficacité que la première fois, il vint se placer entre les deux espers.

Pourtant, il s’immobilisa là, dans les airs alors qu’Eitarō scrutait la jeune fille de son regard bleu acier. Comparé à ce qu’il avait pu observer sa position semblait maintenant bancale, il n’avait pas d’autre mot. Quelques secondes plus tard, le câble se remit en mouvement pour se rapprocher lentement de l’adolescente, sans sembler vouloir l’agresser. L’extrémité prit une forme allongée et quasi-droite tandis que le reste restait en arrière comme figé dans une ondulation. Le bokken de métal d’Eitarō se plaça face à celui de Hikaru, symétriquement.

« Je tiens à te prévenir Fujiwara-san, je n’ai jamais pratiqué l’art du sabre. Mais si tu ne souhaites pas combattre je préfère que tu sortes du ring. »

« Kimura Eitarō, enchanté de même. »

Hikaru l'entendis a peine. Son coeur battait si fort dans sa poitrine, elle avait du mal a entendre. Elle pouvait presque entendre la pluie a nouveau...

Le câble de métal surgit tel un diable hors de sa boite. Hikaru sursauta et recula d'un pas, mais il se contenta de s'immobiliser entre eux. Et lentement, il s'approcha d'elle, tel un serpent qui avise sa proie, délibéré, mesuré, prêt a frapper au moindre signe de faiblesse. Et faible, Hikaru l'était.

Le câble se dressa, et se raidit soudainement. Tel un sabre. Un frisson d'indignation glissa dans son cou. Sabre contre sabre. Il était en train de la provoquer.

« Je tiens à te prévenir Fujiwara-san, je n’ai jamais pratiqué l’art du sabre. Mais si tu ne souhaites pas combattre je préfère que tu sortes du ring. »

Hikaru ne bougea pas. Peut être était il encore temps d'abandonner ? Elle n'était pas en état de se battre. Elle n'était pas prête. Son ennemi était trop fort. A quoi ça sert d'affronter un ennemi aussi fort ?

Pourquoi est ce que je suis la, en train de me battre ?

Le visage de son grand-père lui apparut. Il lui avait souvent posé cette question. Pourquoi est ce que tu te bats, ma petite-fille ? Et a ça elle répondait invariablement "Pour vaincre l'adversaire en face de moi". Et il demandait en retour "Et qui est cet adversaire ?"

Tout ceux qui me défient.

C'était un défi. C'est pour ça qu'elle se battait, pour vaincre ses adversaires. Pour ressentir le frisson de la victoire après un grand combat. A cette pensée, son esprit combattif se réveilla un peu, et sa garde devint enfin correcte. Si il voulait la défier, elle ne perdrait pas. Elle ne perdrait contre personne. Avec un kiai aussi bien destiné a impressionner son adversaire qu'elle même, elle assena un ferme et compact coup de bokken au serpent de métal, pour le dégager de son chemin, et elle s'élança.

Pas un mot ne s’était échappé des lèvres de Hikaru mais ses actions valaient tous les mots du monde. Son corps entier se mit en mouvement comme une machine qui démarrait enfin. Eitarō pu voir une lueur se rallumer dans le regard bleu de son adversaire. Elle allait combattre, et ce dans le but de gagner.

Le câble fut décalé par le coup de l’adolescente, se pliant légèrement à l’endroit où elle le frappa sans remords en exprimant sa volonté à voix haute. Eitarō répondit à ce dernier par un léger mouvement de la tête vers le bas. Il avait pu voir l’acharnement dont elle avait fait preuve contre celle qui devait être une experte en arts martiaux, aussi il savait qu’elle n’abandonnerait pas maintenant.
Cependant elle avait peut-être mal interprété quelque chose.

Le câble fusa vers le bas et remonta en formant une courbe pour venir barrer le passage à la kendoka, rendant le coup qu’elle avait assené un instant plus tôt. Cette fois-ci Hikaru pu sans aucun doute sentir la différence : Le câble ne se plierai plus. Maintenu droit par une série d’aimants invisibles, le bokken de métal resterait désormais aussi dur que le plus solide des sabres. La garde d’Eitarō avait eu son petit effet, mais il ne s’agissait pas là d’une provocation. Il s’agissait d’une invitation.

Les mots n’étaient plus nécessaires désormais, l’affrontement avait débuté et Eitarō voyait sans peine à quel point un combat avait une signification particulière pour Hikaru. Si elle souhaitait se battre contre lui, elle allait devoir le vaincre par les règles qu’il lui imposerait, et ces règles étaient celles que la jeune fille connaissait le mieux. Ou peut-être pas ?

Elle avait a peine fait deux pas que le câble se dressait a nouveau pour lui faire face. Il fendit l'air : Hikaru releva sa garde et l'intercepta sans trop de difficultés, mais elle sentit l'impact dans ses bras. Elle ne devait sous-estimer ce câble...

Elle en était rendu a affronter un sabre sans porteur, une lame sans corps. Quelle façon de se battre de lâche. Pourquoi est ce qu'il ne venait pas lui faire face, ce couard ? Elle n'avait aucun espoir de le toucher a cette distance. Elle pouvait s'échiner a frapper l'arme, mais ce qu'elle voulait toucher c'était l'homme derrière. Cet adversaire qui l'avait défié.

"Tu te trompe, petite pousse..."

Pourquoi est ce que la voix de son grand-père résonnait encore a ses oreilles ? Elle avait enfin un peu d'esprit combattif. Elle ne se trompait pas. C'était sa voie.

Si Kimura refusait de l'affronter, elle le forcerait.

Elle recula d'un pas et se concentra. Une seconde. Deux secondes. Maintenant : Elle s'élança et de sa main droite effleura le câble, et activa son pouvoir. Il était désormais forcé a reproduire les mouvements des deux dernières secondes, et ces deux dernières secondes n'était qu'immobilité : Elle profita de l'ouverture et fonça vers Eitaro a toute vitesse, ignorant sa lame de pacotille pour aller l'affronter en face a face.

"Tu te trompe, petite pousse..."

Un simple effleurement avait mit Eitarō sur ses gardes. Bien sûr il avait pris en compte la possibilité que Hikaru utiliserait son pouvoir sur le câble, mais le simple fait de sentir le poids du métal retenir les mouvements de ce dernier était une sensation dont il n’avait pas l’habitude. Non, ça c’était pas du poids, la limite actuelle de Hardware Coat était bien au dessus de ce que pourrait produire un level 2, c’était différent d’une résistance traditionnelle cette fois-ci le câble semblait comme accroché dans l’espace, figé.

Aussitôt, Eitarō tripla ses aimants. Les doigts de sa main droite tendus vers le câble furent sans pitié envers le serpent retenu par les entraves, le forçant à bouger malgré ces dernières. Mais le métal ne lui obéissait pas comme il le voudrait et la trajectoire prise fut rapidement déviée. Eitarō plissa les yeux, il aurait besoin de plus de temps pour adapter ses calcul à Déjà-vu.

Cependant le temps était ce dont il ne disposait pas actuellement, puisque Hikaru l’avait justement acheté à coup de pouvoir d’esper. Eitarō comptait les secondes autant que la distance disparaissant entre lui et la jeune fille. Le câble fendait quand à lui les airs de façon maladroite, talonnant la kendoka. Son contrôle étant réduit, l’universitaire ne pouvait se permettre de mettre trop de puissance dans les mouvements de son outil sous peine de blesser la jeune fille.

Il arrivait souvent qu’un niveau 4 brille par la puissance qu’il pouvait déployer à l’aide de son pouvoir d’esper. Pourtant ce que les niveaux inférieurs réalisaient peu était que puissance allait de paire avec précision, Eitarō n’avait jamais cherché à augmenter drastiquement sa puissance : de son point de vue la science requérait une précision infinie et ici, ils se trouvaient dans la ville de la science.
Quatorze aimants virtuels vinrent s’ajouter à ceux déjà présents et d’un coup sec, l’extrémité arrière du câble fendit les airs pour fouetter l’arme de Hikaru par le dessus. Le coup avait été plus violent cette fois-ci, et pour cause Eitarō avait récupéré le plein contrôle à mi-manipulation.

« Deux secondes, donc. »

L’étudiant de Dangai avait tenté de transformer l’affrontement en un combat de sabres, cependant l’utilisation de Déjà-vu indiquait que Hikaru ne l’entendait pas cette oreille. Aussi et en tout logique, elle ne verrait probablement pas de problème à ce qu’Eitarō use deux armes au lieu d’une seule tout comme elle.

Le bokken se reforma sur l’une des extrémités du câble tandis que l’autre s’anima d’une volonté fugace : un fouet. Un total de 36 aimants furent déployés par le niveau 4 pour garantir un contrôle sur l’extrémité de son outil et, sans préavis, une pluie de coups s’abattirent sur l’arme de la kendoka. Le bokken de métal et le fouet frappaient en suivant des patterns changeant irrégulièrement. Quel était le but ? D’abord empêcher Hikaru d’utiliser une nouvelle fois son pouvoir sur la totalité du câble, et ensuite de fatiguer ses bras et l’empêcher d’avancer d’avantage. Lorsqu’elle ne pourrait plus utiliser ni son bokken ni son pouvoir, il aurait gagné.

Elle avait a peine fait quatre mètres que le câble était a nouveau sur elle. Pourquoi ? Elle aurait du avoir plus de temps ! Est ce que son pouvoir était vraiment aussi faible ? Peut être qu'elle ne courait pas assez vite ?

Pas le temps de réfléchir. Le sabre de fer avait changé de forme : le serpent était prêt a frapper. Hikaru pris une grande inspiration. Ici, elle ne pouvait pas perdre. Et la passe commença.

Un coup sur sa droite, fulgurant, paré du plat du bokken, un autre fusant vers sa jambe gauche, elle fit un vif pas en arrière, une attaque sur sa tête, elle se baissa, une estoc vers son torse, elle la dévia, un nouveau coup vers sa nuque, du même mouvement du sabre, elle le para, un autre, puis un autre, puis un autre. Sa respiration devint courte, ses bras lourds. Elle refusait de perdre du terrain, mais chaque attaque la forçait a se repositionner, aussi subtilement soit il, et donc a reculer. A gauche... Non a droite !

Le fouet la frappa en plein visage. L'impact l'envoya voler et elle s'écrasa en arrière. Elle sentit quelque chose de métallique dans sa bouche. Elle c'était coupée l'intérieur de la joue. La pluie avait recommencé a battre dans l’arène.

Pourquoi ? C'était injuste. Elle c'était entrainée toute sa vie. Elle avait affronter les meilleurs. Tout les jours, elle travaillait son pouvoir, son sabre et son corps. C'était impossible qu'un étudiant rachitique comme Kimura puisse la vaincre de façon aussi écrasante. Comment est ce qu'elle pouvait vaincre cet adversaire ?

"Tu te trompe, petite pousse..."

La pluie coulait sur ses joues. Ou est ce qu'elle pleurait juste ? Mécaniquement, sans conviction, elle se mit a quatre patte, son corps essayant instinctivement de se remettre debout. C'était son esprit qui refusait de suivre. Elle observa le tapis alors que son sang, sa sueur et ses larmes formaient une flaque. Maudissant son adversaire, maudissant son pouvoir et surtout, plus que tout, maudissant sa propre faiblesse.

"Tu te trompe, petite pousse. L'adversaire que tu dois affronter est différent. Tu le connais par cœur, et pourtant tu commence chaque jour son égal. Tu aura beau t'entrainer, étudier, combattre, chaque jour tu commencera son égal. Il est ton meilleur ami et ton pire ennemi a la fois. Et même si tu le bat aujourd'hui, il reviendra demain, aussi fort que toi."

Et dans le reflet de ses propres larmes, elle trouve sa réponse.

Elle attrapa son bokken qui gisait a ses côtés. Elle pris appui dessus pour se relever, revenant sur ses jambes, et se dressa. Elle ne titubait pas. Elle ne tremblait plus. Du coin du poignet, elle sécha ses larmes, son regard fixé sur son adversaire. Un regard calme, mais inflexible. Froid comme la glace, résistant comme l'acier. Elle avait trouver son adversaire, et il n'y avait pas moyen qu'elle perde contre lui.

D'un geste calculé, elle récupéra le ruban de ses cheveux, et le noua autour de son poignet, s'aidant de ses dents. Elle noua l'autre extrémité au bokken. Et dans un mouvement fluide, elle se mit en garde.

Elle s'avança de quelques pas ferme, et frappa fermement le câble de fer. Un défi. Viens, lui criait-t-elle. Viens, que je te montre ce que je peut réellement faire, et plus encore.

L’agressivité d’Eitarō avait eu l’effet escompté mais, comme il s’y attendait, la jeune fille se redressa pour lui faire face encore. Il la savait tenace, ça ne serait pas un écart de force qui la ferait plier.
Les yeux de l’universitaire s’attardèrent quelques instants sur l’océan de détermination qu’était le regard de Hikaru puis dévièrent sur l’attache improvisée qu’elle avait nouée à son poignet. Cette vision procura une étrange satisfaction au jeune homme qui vit là l’adaptation de la jeune fille à sa stratégie. Maintenant elle ne pourrait pas être désarmée aussi simplement.

Malgré cette astuce et le regain d’énergie de son adversaire, Eitarō n’avait pas bougé d’un millimètre depuis le début du combat et pour l’instant l’affrontement ressemblait en tous points au précédent. Ceci en tête, Eitarō rangea ses mains dans ses poches et plongea son regard dans celui de l’adolescente, sans ciller.

Le fouet disparu soudain de sa position pour réapparaître sous la garde de Hikaru, fendant l’air à une vitesse avoisinant les soixante kilomètres heures. Une feinte. La courbe tracée vers le haut effleura le bokken en soulevant une bourrasque et, l’instant d’après, s’abattit sur ce dernier depuis le haut avec bien assez de force pour déplacer une soixantaine de kilos sur plusieurs mètres vers l’arrière. L’extrémité du câble représentant le bokken fonça dans le même temps vers les jambes de l’adolescente pour les faucher.

La garde de Hikaru n’était pas en cause ; peu importe la solidité de ses appuis il y avait une limite à ce que pouvait encaisser un corps humain sans bouger. Une trajectoire imprévue et une vitesse importante ajoutées à cela avaient permis à Eitarō de trouver l’équation lui permettant de faire reculer la combattante qui se dressait face à lui. La seconde attaque quand à elle servirait à la faire chuter. Le fouet s’était de son côté également remis en charge pour attraper la cheville qui quitterait le sol en premier. À l’instant où Hikaru chuterai, elle serait soulevée du sol et projetée hors du ring. Là était le plan d’Eitarō ; contre Noah il avait testé sa défense, Hikaru serait le test pour son attaque.

Un adversaire immobile, mains dans les poches. Et pourtant, son sabre était vif : le serpent siffla sous sa tête, fendant l'air avec force et fracas. Quelqu'un de normal aurait peut être mordu a l'hameçon, mais Hikaru avait était dans suffisamment de combat pour reconnaitre une feinte. Alors elle ne fut pas surprise en voyant le cable retomber vers elle comme pour la trancher en deux.

Inutile d'affronter ce coup de face; avec aisance et fluidité, elle effectua un pas de côté, esquivant l'attaque... de justesse : le câble effleura a peine sa veste, et pourtant il la déchira. Elle ne pouvait pas quitter le câble des yeux : l'offensive n'était pas terminée... Et elle ne devait surtout pas rompre sa concentration.

Le serpent allait essayer de la faucher : elle n’avait aucun moyen de l'en empêcher, si elle sautait il pourrait juste l'attraper dans les airs, et le combat se finirait comme celui avec Coco : en dehors du ring. Mais elle avait un meilleur plan. Un plan qui lui permettrait peut être de vaincre son véritable adversaire.

Elle sauta en avant, pour esquiver le câble, montant ses genoux au maximum pour s'assurer que le câble la dépasse bien. Son regard était rivé dessus, sur son mouvement, sur ses actions. Et quand elle le sentit essayer de saisir sa cheville, elle activa son pouvoir.

Le câble commença immédiatement a faire le chemin inverse : Elle fit quatre pas rapide pour s'avancer et laisser derrière elle les coups de fouet et de sabre violent qui l'avait attaquer il y as quelque secondes. Et elle braqua ses yeux sur Kimura et fonça.

Elle avait mis le plus de temps possible dans cette impulsion la : 3 secondes. C'était plus qu'assez pour arriver au contact. Surtout que ce n'était pas un Deja-Vu sur une cible immobilisée comme tout a l'heure : ici, le câble avait bouger avec force, essayer de changer sa trajectoire serait extrêmement dur. Mais elle ne pouvait pas briser sa concentration. Elle devait continuer. Sa tête lui faisait mal, son corps était fatigué, mais c'était ce que demandait son adversaire : si elle voulait le vaincre, elle devait au moins en arriver la.

Et enfin, elle arriva a portée de bokken. Son bras gauche, celui ou était accroché le bokken, s'éleva brusquement, comme si elle armait un coup de poing, tandis que l'autre se préparait a empaler son adversaire, en plein dans le plexus solaire. Elle était prête.

Comme Noah, elle avait esquivé. Comme Noah, elle était passée. Comme Noah, elle allait le frapper. Et tout comme Noah, il avait décidé de l’écarter.

Le bokken était juste là, prêt à le frapper à sa gauche. Et à sa droite, un coup déjà prêt à l’envoyer au tapis. Eitarō n’avait ni la forme physique ni l’entrainement d’Hikaru, et si ça avait été un combat sans pouvoirs, tout comme contre Noah il aurait perdu. Mais ça n’en était pas un. Dans un bruissement de tissu, la veste de l’universitaire s’ouvrit soudain et quatre pinces s’en échappèrent pour fondre sur la jeune fille, leurs gueules de métal ouvertes et prêtes à mordre. Et à cette distance elles ne rateraient pas.

Même si Hikaru décidait de ne pas se défendre et de mener à bien son attaque quitte à ce que toutes les pinces l’attrapent, Eitarō savait qu’elles ne pourraient que la ralentir à cette distance : elle pourrait toujours le toucher si elle abandonnait la défense.

[ Et c'est une chose que je souhaiterai éviter. ], pensa-t-il en rendant son regard à Hikaru, juste devant lui.

Le cylindre numéro un s’enfonça dans l’estomac de l’adolescente sans aucune pitié et continua encore d’avancer, la forçant à reculer en même temps que les pinces s’empêtraient dans ses vêtements. La bête était enlisée.

Il manquait à Eitarō quelque chose d’important dans ces combats, il s’agissait de quelque chose que les autres participants lui avaient appris, en particulier Noah et juste à l’instant Hikaru. L’expérience. Lui n’avait pas passé des heures à perfectionner des techniques destinées à vaincre des adversaires et pas même son cerveau  exceptionnel ne lui permettait de pallier à ce retard. Alors tel un scientifique il testait et observait les réactions, cherchant la réponse dans le langage de la personne qui lui faisait face. Pour Hikaru le temps n’était que la moitié de la réponse, et il venait de trouver l’autre moitié.

[ Le contact visuel.]

Alors ses propres yeux n’avaient pas quitté ceux de l’adolescente. Il avait abandonné le câble au profit d’instruments multiples, moins visibles et plus rapides. Les limites de Déjà-vu n’étaient pas encore bien définies dans l’esprit d’Eitarō mais une chose était sûre, il serait impossible pour Hikaru d’arrêter l’ensemble de ses outils. Deux chemins s’ouvraient uniquement à elle : attaquer ou défendre. Il n’allait lui laisser aucun des deux.

Le second cylindre se plaça entre la jeune fille et Eitarō, prêt à neutraliser n’importe quelle attaque désespérée qui tenterait de le toucher à cette distance.

La veste d'Eitaro s'ouvrit soudain, sous les yeux surpris d'Hikaru : Quatre pinces s’élancèrent vers elle et s’accrochèrent a sa veste, déchirant un peu plus le pauvre tissu qui n'en avait pas demandé autant. Et quelque chose frappa son ventre et elle se sentit s'éloigner de Kimura.

Pas perdre la concentration, pas perdre la concentration.

Ses appuis étaient mauvais : le cylindre la souleva littéralement. Il lui fallut deux bonnes secondes pour s'en débarrasser en jouant des hanches. Puis elle toucha le sol. Un sourire aux lèvres. Elle avait essayer d'attaquer, il c'était protégé et l'avait repoussée.

Comme prévu.

Et elle activa Deja-Vu. Pas sur les pinces, pas sur son bokken, pas sur le câble.

Sur elle même.

Elle s'élança sur le chemin inverse. Elle avait volontairement opposé le moins résistance possible au cylindre pour pouvoir aller le plus vite possible et donc revenir le plus vite possible. Elle n'avait juste pas prévu les pinces, et elle pouvait les sentir résister, essayer de la maintenir en place. Quelqu'un devait l'aimer la haut cependant : car sa veste était a moitié déchirée après le coup de tout a l'heure : deux des pinces restèrent fermement accrochés, mais a du tissu qui se déchira et vola derrière elle, laissant sa pauvre veste en loque. Sa tête hurlait de douleur, ses yeux se remplirent une nouvelle fois de larmes alors qu'elle refusait de fermer les yeux une seconde. Faites qu'elle ait assez de distance. Faite que...

Elle arriva a un mètre de son adversaire. Son poing fit l'exact mouvement inverse que tout a l'heure, fonçant vers son adversaire...

Et s'écrasa dans un cylindre en fer.

Son poing lui fit brusquement mal. Elle se demanda si elle c'était brisée quelque chose. Mais cela importait peu. Car quelque chose volait.

Ce n'était pas vraiment un coup de poing qu'elle armait tout a l'heure. Tout comme elle n'avait pas vraiment noué son bokken a son poignet pour s'assurer qu'il ne lui échappe pas. Ce qu'elle avait fait, c'est utilisé tout ce qu'elle avait vu aujourd'hui : l'importance de la distance que lui avait appris Kotadjima. Les stratégies d'éloignement et de projections que lui avait montré Coco. La puissance d'un fléau. Comment utilisé intelligemment l'équipement qu'on portait sur soi, aussi banal soit il, fut il une simple bande de boxe... ou un solide ruban.

Ce qu'elle avait armé tout a l'heure, c'était en réalité le lancer de son bokken, au bout de son ruban, projeté a toute vitesse par le bras d'Hikaru mais aussi toute la vitesse accumulée durant son utilisation de Deja-Vu. Direction le crane de Kimura. Une attaque qui utilisait tout ce qu'elle avait appris aujourd'hui. Tout ce qui la rendait meilleure que le seul adversaire qu'elle aurait vraiment a vaincre, si elle voulait progresser en tant que personne.

Celle qu'elle était hier.


Et le bokken vola.

Cette fois l’expression d’Eitarō changea et la surprise peignit son visage alors que ses yeux s’agrandissaient devant la scène qui se présentait à lui : Hikaru revenait, et ce à pleine vitesse. L’universitaire prit immédiatement toute la mesure de la menace que représentait ce retour fulgurant : ses défenses étaient derrière sa cible mais le temps qu’elles viennent s’interposer… il ne lui restait qu’un cylindre en guise de bouclier. Et le level 4 ne pouvait s’en prendre qu’à sa propre négligence : ce coup ci, il ne l’avait pas vu venir.

Les cheveux blancs d’Hikaru voletèrent à moins d’un mètre de lui qui, comme n’importe quelle personne à sa place eut un mouvement de recul instinctif. La forteresse de fer avait bougé.
Le coup de poing fut bloqué de justesse par le cylindre et aussitôt l’image de la position de Hikaru quelques secondes plus tôt apparut dans l’esprit d’Eitarō. Ses yeux virèrent sur la seconde attaque : le bokken dans sa main droite… vide. Ruban. L’étudiant d’ordinaire si calme sentit son sang se glacer dans ses veines alors que ses yeux faisaient le chemin inverse pour s’accrocher sur le poignet gauche où, au bout du ruban, la véritable menace touchait presque son visage.

La charge de calculs passa de 30 à 100% instantanément et le corps d’Eitarō fut brusquement décalé sur la gauche alors que sa tête fut projetée avec violence dans la même direction dans un bruit sourd. Le coup avait fait mouche.

Des étoiles aussi brillantes que celles de la voie lactée illuminaient la vision trouble d’Eitarō qui dut cligner des yeux plusieurs fois avant de voir sa main gauche à plat sur le sol du ring.

[ Défense !]

Le cylindre se mit à zigzaguer aléatoirement dans les airs entre lui et les deux pinces métalliques les plus proches, heurtant brutalement le sol à plusieurs reprises tant la manœuvre manquait de précision. Une main sur le côté droit du visage, Eitarō se redressa légèrement en tentant de rassembler les informations des dernières secondes. Sa défense était rudimentaire et Hikaru ne tarderait pas à identifier son pattern pour passer au travers, la douleur était forte et embrouillait ses calculs. Il devait rassembler sa concentration.

Le coup avait balayé tout contrôle sur les pièces de métal qui s’étaient écrasées au sol, inertes. Et il en avait été de même pour la ceinture et les plaques de métal dans ses chaussures désormais abîmées à cause des frottements. Hikaru l’avait privé de sa vue, sans son quadrillage magnétique il aurait peut-être déjà perdu le combat. Plus encore, sa stratégie avait gagné. Expérience contre adaptation. Cette fois l’expérience avait surpassé l’esprit analyste de l’universitaire qui posa enfin son regard sur la jeune fille, dévoilant un hématome grandissant sur le côté droit de son visage où son œil était fermé. Son unique œil valide la transperça d’un regard glacial.

Le cylindre n’heurtait plus le sol.

« C’était très impressionnant, Fujiwara-san. » dit-il en tentant d’ignorer la douleur lancinante de son côté droit et de ses hanches.

Et le bokken toucha.

Son adversaire fut projeté , forcé de mettre un genoux au sol alors que du sang coulait sur le tapis.

Un pur rush d’adrénaline déferla dans le corps d'Hikaru, soufflant sa fatigue et son mal de tête, soufflant la pluie. Elle était en train de vivre le plus beau moment de sa vie. Elle avait dépassé tout ce que le monde attendait d'elle. Elle avait infligé un coup décisif a un ennemi formidable. Mais plus que tout, ce qui la rendait aussi extatique, c'était ce prodigieux sentiment qu'elle était en train de transcender ses limites. Et le mieux dans tout ça ?

Elle n'avait même pas fini.

Elle ramena le bokken a elle d'un coup de poignet et s'écarta alors que le cylindre fusait a quelques centimètres de son visage, par pur reflexe. Le pouvoir de son adversaire semblait être quelque peu troublé : Les cylindres volaient partout, mais s'écrasaient réguliérement au sol. Les pinces étaient plus ou moins incontrolables. Mais elle pouvait facilement éviter tout ça, elle le savait.

Une autre chose que son combat contre Kotadjima lui avait rappeller, c'était qu'un esper n'était jamais plus vulnérable que quand il était désorienté. Alors elle ne perdit pas une seconde, esquiva les cylindres et fonça.

« C’était très impressionnant, Fujiwara-san. »

Son sourire s'élargit. Bien. Il était encore d'attaque. Elle ne devait pas le sous-estimé. Pas maintenant. Pas si près. Elle avait sous-estimé Kotadjima en pensant que son pouvoir lui donnait un avantage et elle avait payer pour ça. Elle ne répondit pas, mais se glissa dans l'angle mort nouvellement créer par son œil fermé. Si il ne pouvait pas la voir, il aurait beaucoup plus de mal a parer ses attaques, et elle pourrait en plus frapper la ou ça fait mal.

Elle prépara mentalement son enchainement : Premièrement, coup d'estoc juste sous les côtes, pour le priver de souffle, et éviter de trop s'investir en cas de contre attaque. Puis feinte, le laisser voir le sabre dans son champ de vision, le laisser penser a un coup qui viendrait sur son œil visible mais changer de trajectoire et frapper le côté meurtrie de son crâne.

Son sourire s'élargit

"Celle la elle est pour toi, Coco !"

La douleur ne partait pas. Évidemment il ne s’agissait pas de quelque chose dont l’on pouvait se débarrasser aussi facilement mais pour Eitarō, utiliser son pouvoir dans ces conditions était une première. Ça et son champ de vision réduit. Il suivait toujours la position de Hikaru cependant, à l’aide des deux pinces toujours accrochées à ses vêtements. Elle était proche, vraiment proche. Pour lui, qui ne pourrait jamais rivaliser au corps à corps et dont la capacité était plus efficace sur des distances moyennes à longue, cette situation était loin d’être idéale. Et c’était vrai, mais également ce que n’importe qui penserait.

Eitarō refusait catégoriquement de quitter Hikaru du regard, une main ouverte devant lui il dressait comme une barrière pour l’empêcher de se rapprocher d’avantage. Il était inexpérimenté, ses calculs étaient affaiblis et son champ de vision était réduit mais Hikaru avait face à elle un level 4, élite des espers et dont le travail acharné n’avait jamais été vain.

[ Tes trois secondes sont écoulées depuis longtemps. ]

Eitarō avait commit une erreur, fruit de son inexpérience, mais il n’était pas le seul. Hikaru aussi, elle avait été si focalisée sur l’idée de l’abattre lui qu’elle avait oublié le début du combat. Derrière elle, et bien que le coup de bokken avait ralenti l’exécution de la manœuvre, le serpent de métal s’était frayé un chemin depuis les dernières 7 secondes. Caché dans son dos, Eitarō avait veillé à ce qu’elle ne puisse pas le voir s’approcher.

Le câble se glissa sous la mâchoire de Hikaru avec la vivacité d’un serpent, levant de force la tête de la jeune fille et l’immobilisant dans la position. Maintenant elle ne pourrait plus le voir même en baissant les yeux. Gardant la même vitesse, le reste du câble s’enroula autour de la taille et des membres de l’adolescente puis se mit à serrer jusqu’à entraver complètement ses mouvements. Peu importe la force qu’elle y mettrait, elle ne pourrait pas se défaire de cette étreinte. Quand à la dernière carte que Hikaru avait déjà jouée, utiliser sa capacité sur son propre corps n’aurait comme effet que de la faire souffrir. Bien qu’affaiblit, Eitarō avait vu ses pièces subir la capacité de la jeune fille à deux reprises. Cette fois, il saurait adapter.

Le boa de métal fut soulevé du sol en même temps que sa charge et se dirigea aussitôt vers la limite du ring, à peine à quelques mètres de là.

[ Échec et mat.]

Elle voyait le plafond.

Oh, non, pas encore.

Quand ses yeux se baissèrent a nouveau, elle vit le serpent de fer s'enrouler autour d'elle. Elle l'avait oublié. Merde ! Avant qu'elle ne puisse se dégager, elle se retrouva complétement entravée par le câble. De désespoir elle regarda ses membres, agrippant désespérément son bokken. Pas comme ça.

Et le serpent l'emporta. Vers le bord du ring. Le scénario catastrophe se déroulait sous ses yeux.

Enfin, il se déroulerait si elle regardait effectivement le bord de l’arène, mais ce n'était pas le cas. Elle regardait son dernier espoir.

Son bokken dans sa main.

Elle déploya tout ce qu'elle pouvait en pouvoir mental. Elle n'avait pas exactement compté, mais ça devait suffire. Ça devait suffire.

Le bokken commença a la tirer dans l'autre sens. Elle tira en retour de toute la force que lui permettait ses bras. Son souffle se faisait court. Son pouvoir mental contre celui d'Eitaro. Mais Eitaro avait subit des gros dégâts a la tête, pas vrai ? Ça devait être aussi dur pour lui que pour elle. Et alors que son bokken la tirait elle cherchait un plan. Une idée. Quelque chose.

Une ultime résistance, elle ne lâchait pas, pas encore. Mais Eitarō le savait, Hikaru n’abandonnerait pas ce combat. Était-ce du à son affrontement précédent ou était-ce dans sa nature ? Il ne pouvait pas le savoir mais à choisir, il aurait opté pour la seconde option.

Les calculs de l’esper montèrent à 40% d’efficacité et la douleur dans son côté droit se fit plus aigue sous l’effort mental. Le sabre tirait d’un côté, le serpent de l’autre. Pourtant petit à petit, centimètre par centimètre, il se rapprochait de l’étudiant de Dangai.

Son acharnement était presque une insulte, elle pensait pouvoir le vaincre sur son terrain parce qu’elle était parvenue à l’affaiblir avec un coup ? C’était là ce que certains interpréteraient, ceux qui avaient choisi le chemin de l’arrogance. D’autres, en revanche accuseraient les méthodes de l’universitaire, son absence de pitié pour un niveau plus faible et sa froideur. Ce chemin ci était celui des ignorants. Eitarō n’était dans aucun des deux cas, de son point de vue Hikaru faisait tout ce qu’elle pouvait pour gravir les échelons, peut-être pour prouver quelque chose mais il n’y avait pas à chercher plus loin. C’était lui contre elle, ni plus, ni moins.

3, 2, 1.

L’extrémité du bokken était arrivée jusqu’à quelques centimètres du visage d’Eitarō.

Maintenant commençait la descente du dragon.

Son bokken la tirait. Elle pouvait sentir les contreforces qui tiraient son corps dans deux direction différentes. Et pourtant elle avançait... Elle avançait... Pas assez...

Besoin de quelque chose. Un peu de temps. Juste une fraction de seconde...

Il y avait bien quelque chose.

Elle ne l'avait fait qu'a l'entrainement. Ce n'était pas quelque chose qu'elle était très douée pour. Reposée et bien en forme, elle y arrivait une fois sur cinq. Pour elle qui n'était pas une très bonne esper, c'était sa bête noire.  Mais c'était tout ce qu'elle avait. Son cerveau. La pire partie de son corps de combattante. Mais aujourd'hui elle dépassait ses limites. Elle pouvait le faire. Elle devait le faire.

Elle prépara son timing avec tout ce qui lui restait. Elle n'aurait qu'une chance. Elle devait attendre le dernier moment. Son cerveau était en ébullition. Un violent mal de crane la força a fermer son oeil droit. Elle sentit la chaleur monter dans sa tête, le sang couler de son nez.

Et quand elle arriva a quelques centimètres de bokken du visage d'Eitaro... Elle était presque immobile...

Elle activa une deuxième instance de Deja-Vu au moment ou la première se terminait Puis une troisième juste après. Sur son ruban. deux fois une fraction de seconde. Plus long, elle serait partie avec le câble, mais en profitant de la remise a zéro de la vélocité en fin de Deja-Vu, elle pouvait essayer de se maintenir immobile.

Une demi-seconde. C'est tout ce qu'elle avait pu se donner. Avec un cri de guerre terrible, elle fit légèrement glisser son bokken de ses doigts, pour avoir le plus de portée possible, et d'un coup de poignet envoya son bokken s'écraser sur le crane de son adversaire.

Le coup résonna dans la tête de l’esper, irradiant son crâne d’une douleur sourde et lui faisant momentanément perdre sa concentration. Le boa de métal vacilla et toucha à moitié le sol, une partie restant suspendue dans les airs. Une nouvelle fois la théorie s’était révélée bien différente de la pratique, qui aurait cru que Hikaru tenterait encore de le toucher à ce stade ? Non ce n’était peut-être pas ça, Eitarō n’avait pas assez anticipé son esprit logique lui avait soufflé qu’il était hors de danger. Et ça avait été une erreur.

Hikaru avait délibérément cherché à le frapper à la tête pour perturber ses calculs, bien consciente que sans son pouvoir, Eitarō n’était qu’un cerveau vif qui pouvait absorber une quantité astronomique de connaissances. En d’autres mots, pas un combattant comme elle : depuis le début de l’affrontement la jeune fille avait cherché à perturber et affaiblir Eitarō là où lui ne s’était contenté que de repousser ses assauts et contre-attaquer bêtement. Ces petits échanges frivoles ne pouvaient pas même être appelés stratagèmes… l’universitaire avait purement et simplement sous-estimé son adversaire.

Et pour cela, il devait se rattraper. Eitarō venait de prendre deux coups successifs à la tête mais la puissance de ces derniers avait été amoindrie. Pour autant, sa capacité de calculs n’était à son maximum… mais était-elle à son maximum avant cela ? La réponse était non, Eitarō n’avait jusqu’ici utilisé qu’un seul de ses pointeurs. Maintenant c’était ses deux mains qu’il présentait à Hikaru.

Pas un seul esper n’avait accepté de faiblir après avoir essuyé un ou deux coups, Hikaru elle-même en était l’exemple vivant. Eitarō avait encore de la ressource, et elle venait de lui prouver qu’il pouvait s’en servir. L’acharnement de la jeune fille avait porté ses fruits en un sens, alors décidant de répondre à sa dernière attaque, Eitarō augmenta son seuil de calculs et activa son pouvoir. Une véritable vague magnétique s’empara du contrôle du câble, le resserrant sans pitié ni douceur autour de sa prisonnière et, moins de trois secondes après qu’Hikaru ait poussé son cri, le métal l’emporta à une vitesse folle vers la sortie du ring.

Si le code de conduite d’Eitarō lui avait imposé un limiteur, Hikaru venait de réduire ce dernier en mille morceaux.

Elle avait touché.

Le temps s'arrêta un instant. Elle vit Kimura reculer sous l'impact. Elle sentit son bokken glisser de ses mains, lentement, incapable de le rattraper. Le cable de fer perdit en tension. Elle se sentait si légère... Elle avait gagné. Elle ferma ses yeux qui commençaient a lui faire mal car elle avait cessé de cligner. Elle avait tellement appris aujourd'hui. Le flux de la bataille avait était tellement intense. Elle avait l'impression qu'elle pourrait dormir un million d'années après ça. Comment est ce que les techniques de sabre évoluerons en un million d'année ? Elle n'en avait aucune idée. Ce serait excitant de le découvrir.

Mais elle ne pouvait pas dormir pendant un million d'année. Elle avait un combat a finir demain. Et puis, elle n'allait pas laisser Coco seule aussi longtemps. Elle serait seule sans son amie. Peut être qu'elle pourrait venir avec elle ? Ah, mais il y as les cours... Dommage. Peut être qu'a la fin de leurs études, elles iraient ensemble visiter le monde. Elle aimerait beaucoup ça. Elle avait entendu le plus grand bien des escrimeurs européens.

En attendant, elle avait rendez vous demain...

"Eh, moi de demain... J'ai hâte de voir comment tu va battre ça."



Le signal de la fin du combat retentit dans l’arène.

Hikaru Fujiwara, sa veste déchirée, ses cheveux tachés de sang et de sueur, gisait, inconsciente, en dehors de l’arène, son bokken laissé a l'abandon au bout de son ruban noir.

Sur son visage, un sourire apaisé, comme un enfant qui dors.